Par Koffi SODOKIN,
Maître de Conférences à l’Université de Lomé
Introduction
Les progrès significatifs réalisés ces dernières années démontrent que le Togo est sur la voie d’une nation florissante et épanouissante. Les investissements dans des domaines clés et des politiques publiques axées sur le bien-être offrent un cadre solide pour renforcer la cohésion sociale et la solidarité, assurant un avenir lumineux pour la population togolaise. En unissant les forces du gouvernement, des organisations et des individus, le Togo est en mesure de relever les défis et de construire une société où chacun a la possibilité de s’épanouir et de contribuer au bonheur collectif. L’avenir du Togo est empreint d’espoir et de possibilités, et cet optimisme sert de base à une nation heureuse et prospère. Ceci est principalement mis en évidence par les chiffres récents publiés dans le World Happiness Report (2023).
- Du concept d’Eudaimonia au bonheur des peuples
Le concept d’Eudaimonia, issu de la philosophie grecque, représente un état de bien-être et de bonheur durable découlant d’une vie accomplie et épanouissante. Cette conception du bonheur se distingue de l’approche plus courante, fondée sur la satisfaction des désirs immédiats et des plaisirs éphémères (Clark et al., 2020). Ce concept est utilisé en économie pour évaluer le bien-être économique et social d’une société. Lorsque les individus d’une société parviennent à réaliser leur potentiel et à mener une vie épanouissante et satisfaisante, cela peut engendrer des effets positifs sur l’économie. Par exemple, des individus plus heureux et en meilleure santé peuvent être plus productifs au travail, contribuer davantage à l’économie et réduire les coûts des soins de santé. En outre, les politiques économiques et sociales visant à améliorer le bien-être des individus peuvent conduire à des sociétés plus stables et prospères à long terme. Ainsi, le concept d’Eudaimonia peut orienter les politiques économiques vers la réalisation d’objectifs de bien-être plutôt que de croissance économique uniquement. L’économie du bonheur et le concept d’Eudaimonia mettent en évidence que le bien-être constitue un objectif fondamental et que les politiques économiques et sociales devraient être élaborées pour favoriser le bien-être des individus et des communautés. Ce concept souligne l’importance des aspects non monétaires de la vie pour le bien-être, remet en question l’idée selon laquelle la croissance économique à elle seule garantit le bonheur et soutient que les politiques publiques devraient être axées sur le bien-être plutôt que simplement sur la croissance économique ou les profits des entreprises. Enfin, ils mettent en avant l’importance d’une approche holistique pour atteindre le bien-être et l’épanouissement à long terme (Diener et al., 2018).
Dans ce contexte, les politiques publiques devraient être axées sur le bien-être des individus et des communautés, en accordant la priorité à l’investissement dans la santé mentale et physique, l’accès à l’éducation et la formation tout au long de la vie, la cohésion sociale et la solidarité, la création d’environnements de travail sains et sécurisés, ainsi que la promotion du développement durable. Cela implique des mesures telles que la fourniture d’un accès facile et abordable aux soins de santé, le développement de programmes de prévention des maladies et la création de communautés inclusives, entre autres. Concernant la priorité accordée à l’investissement dans la santé mentale et physique, l’instauration par le gouvernement togolais de journées nationales dédiées au sport constitue une initiative exemplaire en la matière.
Au cours des 15 dernières années, le gouvernement togolais a mis en place de nombreuses politiques et initiatives pour améliorer le bien-être et le bonheur de sa population. Des investissements ont été réalisés dans la santé mentale et physique, l’éducation, la cohésion sociale, l’environnement de travail, la durabilité et la lutte contre la corruption. Les indicateurs clés, tels que l’espérance de vie en bonne santé, le soutien social, la liberté de choix de vie et l’affect positif, ont tous connu une amélioration constante depuis 2005. Ceci témoigne des efforts continus déployés par le gouvernement pour améliorer l’indice du bonheur au Togo. Cet indice a évolué de 2,9 en 2010 à 4,2 en 2022 (Graphique 1).
Graphique 1. Variation de l’Indice du Bonheur au Togo
Source. WHR, 2023.Données disponibles sur https://worldhappiness.report/
L’analyse des données relatives à l’indice de satisfaction de la vie (également appelé “Life Ladder”) révèle une augmentation progressive au Togo, passant de 3,202 en 2006 à 4,239 en 2022. Cette évolution témoigne d’une perception plus positive de la vie et du bien-être de la part de la population togolaise. Par ailleurs, le PIB par habitant a également connu une croissance régulière au Togo, s’élevant de 7,342 en 2006 à 7,685 en 2022, contribuant ainsi à l’amélioration des conditions de vie des citoyens (voir Graphique 2).
Graphique 2. Evolution de l’indice du Bonheur et du PIB/Tête (2005-2022)
Source. WHR, 2023.Données disponibles sur https://worldhappiness.report/
Plusieurs études ont démontré que l’accroissement de l’indice de bonheur est étroitement lié à la croissance économique (Becker et al., 2008). Les données empiriques corroborent cette hypothèse pour le Togo (voir Graphique 3). En effet, lorsque les pays en développement connaissent une expansion économique, cela peut se traduire par une amélioration des conditions de vie des populations, ce qui peut, à son tour, engendrer une hausse de leur bonheur et de leur bien-être. Par ailleurs, une économie prospère peut offrir davantage d’opportunités d’emploi, de meilleurs salaires et des niveaux de vie plus élevés, ce qui peut également impacter positivement l’indice de bonheur des individus.
Graphique 3. Corrélation entre l’indice du Bonheur et le Pib par tête au Togo
Source. Auteur à partir du WHR, 2023.Données disponibles sur https://worldhappiness.report/
Le soutien social a également connu une croissance régulière, passant de 0,435 en 2006 à 0,579 en 2022, grâce aux efforts du gouvernement et des initiatives privées visant à soutenir les communautés locales. L’espérance de vie en bonne santé à la naissance a également affiché une amélioration significative, passant de 50,240 en 2006 à 57,700 en 2022, ce qui pourrait résulter d’une amélioration de l’accès aux soins de santé de qualité et de l’éducation sur les pratiques de santé préventive. La liberté de choix de vie a également progressé, passant de 0,628 en 2006 à 0,696 en 2022, grâce à l’amélioration de l’environnement politique et social et à l’adoption de politiques publiques favorisant l’autonomisation individuelle (WHR, 2023). Néanmoins, le niveau de générosité demeure relativement faible au Togo, avec une légère diminution au fil des années, passant de -0,027 en 2006 à 0,007 en 2022, et les disparités de bonheur entre les différentes strates de la population persistent. Le gouvernement togolais a poursuivi ses efforts d’assistance à la population et même pendant les périodes les plus compliquées comme celle du SARS-CoV-2 (Sodokin, 2021, 2023), et les actions positives dans ce sens devraient se poursuivre.
Conclusion
Les efforts déployés par le gouvernement togolais au cours des 15 dernières années ont entraîné des améliorations notables dans divers domaines tels que l’économie, l’éducation, la santé et les infrastructures. Bien que l’indice de bonheur ne soit pas le seul indicateur à considérer, ces facteurs peuvent avoir un impact significatif sur le bien-être de la population togolaise. Les efforts soutenus pour renforcer l’emploi et améliorer les salaires doivent être maintenus (Sodokin et al. 2022). Il est donc essentiel de poursuivre les investissements dans ces domaines afin d’améliorer les conditions de vie de la population togolaise et, à long terme, d’accroître encore l’indice du bonheur. En agissant ainsi, le gouvernement togolais contribuera à la réalisation d’une société plus épanouissante et prospère, en accord avec les principes de l’eudémonisme et de l’économie du bonheur.
Références
Becker, G. S., Rayo, L., & Krueger, A. B. (2008). Economic growth and subjective well-being: Reassessing the Easterlin paradox. Comments and discussion. Brookings Papers on Economic Activity, 2008(1), 1-87.
Clark, A. E., Flèche, S., Layard, R., Powdthavee, N., & Ward, G. (2020). The key determinants of happiness and misery. Social Science & Medicine, 249, 1-7.
Diener, E., Oishi, S., & Tay, L. (2018). Advances in subjective well-being research. Nature Human Behaviour, 2(4), 253-260.
Graham, C., & Pinto, S. (2018). Unequal hopes and lives in the USA: Optimism, race, place, and premature mortality. Social Science & Medicine, 198, 13-22.
Sodokin K (2021) Comparative analysis, cash transfers, household investment and inequality reduction in Togo. Appl Econ 53:2598–2614. https://doi.org/10.1080/00036846.2020.1863324
Sodokin, K. (2023). Public assistance, survival, and household trust during the containment period of the first wave of the SARS-CoV-2 pandemic in Togo. Journal of Social and Economic Development. https://doi.org/10.1007/s40847-023-00233-4
Sodokin K., Couchoro M.K. & Tozo K.W. (2022) Macroeconomic channels of transmission of post-pandemic recovery strategies for African economies, Cogent Economics & Finance, 10:1, 2125656, DOI: 10.1080/23322039.2022.2125656
World Happiness Report (2023). https://worldhappiness.report/